Cet article n'est pas une protestation contre les personnes qui stationnent sur les places réservées aux titulaires de la carte d'invalidité. Il serait plutôt une dénonciation des comportements de ceux qui veulent protester contre cela.
En effet, comme beaucoup de cardiaques congénitaux, je bénéficie du macaron bleu. Hélas, je ne suis pas la seule à renoncer au droit de me garer plus près de l'entrée.
Systématiquement, nous sommes dévisagés, occasionnellement accostés et parfois agressés. Nos opposants sont des victimes de l'amalgame existant entre handicap et immobilité. Ces places sont marquées d'un pictogramme illustrant un individu en fauteuil roulant et véhiculent une image fausse de l'invalidité. Ils se veulent défenseurs d'une catégorie de la population qui leur est étrangère.
On nous a déjà accusé d'incivilité, illégitimité ou de vol de carte de stationnement. On a quelquefois attendu que nous entrions dans le supermarché pour laisser un mot sur le pare-brise ou on nous a attaqués avant même que le contact soit éteint.
Doit- on se justifier? Doit on apprendre aux gens qu'on peut paraître en bonne santé et ne pas l'être, qu'on peut être jeune mais extrêmement fatigable? Doit on les mépriser tel qu'ils le font ou les ignorer?
Il m'est impossible de comprendre ces attitudes écœurantes. Obstination de justice aussi absurde qu' éphémère, curiosité malsaine, manque de piment dans une existence livide, volonté d'exécuter une bonne action...
Les auteurs de ces pratiques ne peuvent, eux non plus, comprendre ce que nous ressentons lorsqu'ils nous désignent coupables d'une infraction que nous n'avons pas commise. Surtout, ils sont incapables de soupçonner l'étendue de nos vécus. Leur conduite dévoile la petitesse de leurs problèmes face aux nôtres.
Les places bleues nous sont offertes afin de réduire nos efforts mais de tels agissements nous épuisent davantage. Nous devons concentrer le peu de forces que nous possédons afin de riposter et même de supporter les incessantes offensives.
Jouer le rôle d'une pervenche n'a rien d'enrichissant, bien au contraire, cause beaucoup de tort. L'étroitesse d'esprit des humains se heurte fréquemment à l'infime. L'acharnement de la tolérance engendre l'intolérance, de même que le rejet du marginalisme entraine le refus de ce droit.